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L’accessibilité à des médicaments de qualité doit encore faire face à de nombreux défis sur le continent africain. Les chaînes de distribution sont souvent fragmentées, avec de multiples intermédiaires ou des canaux parallèles qui alimentent bien souvent la contrefaçon, véritable enjeu de santé publique.

À titre d’exemple, on estime que près de 60 % des médicaments achetés dans le golfe de Guinée entrent dans la classification « SF » (qualité inférieure, falsifiés) de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Et le problème ne touche pas que l’Afrique puisque 10 % de l’ensemble des médicaments en circulation dans le monde pourraient être « SF ».
Quant à la production locale, celle-ci peine encore à se faire une place dans un marché pharmaceutique africain alimenté à 70 % par les importations étrangères et marqué par des difficultés d’accès aux matières premières, notamment aux principes actifs, et à des contraintes logistiques majeures (respect de la chaîne du froid, complexité des opérations de dédouanement, délais de livraison aléatoires, etc.). Au Sud du Sahara, mis à part en Afrique du Sud et en Tanzanie, il est difficile voire impossible de trouver des unités de production de principes actifs. L’accès aux financements, la mise en place d’outils industriels performants, le manque d’harmonisation réglementaire entre pays ou encore la disponibilité de personnels hautement qualifiés, sont des freins supplémentaires au développement des acteurs privés de l’économie du médicament sur le continent.
Pour autant, l’incidence de plus en plus élevée des maladies chroniques (cancer, diabète, infections pulmonaires, maladies cardiovasculaires, etc.), les transitions démographiques à l’oeuvre, le volume croissant de médicaments génériques produits, la promesse d’une couverture universelle ou encore l’émergence de classes moyennes disposant d’un pouvoir d’achat qu’elles sont prêtes, pour partie, à dédier à leur santé, sont autant de facteurs de croissance de la demande de médicaments en Afrique. Ainsi, selon des estimations, les dépenses anticipées pour les produits pharmaceutiques devraient atteindre entre 40 et 45 milliards de dollars par an en Afrique d’ici 2020, contre 14,5 milliards en 2010.
Face au développement attendu, dans les années à venir, du secteur de l’industrie pharmaceutique sur le continent africain, les synergies entre acteurs publics et privés sont incontournables. Déjà, dans un contexte de faibles ressources budgétaires étatiques, les acteurs privés ou non lucratifs sont de plus en plus sollicités par les pouvoirs publics comme une alternative aux systèmes, parfois défaillants, d’approvisionnement et de distribution des médicaments.
Les enjeux d’accessibilité aux médicaments en Afrique peuvent ainsi être définis selon quatre grands critères, auxquels il est crucial que les acteurs des secteurs tant public que privé puissent répondre : mettre à disposition des médicaments cohérents avec les besoins des populations et en nombre suffisant ; rendre les prix abordables pour les patients et les systèmes de santé ; garantir un niveau satisfaisant de qualité, de sécurité et d’efficacité ; et enfin rendre plus efficaces les réseaux de distribution de médicaments.


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Marie-Paule Kieny

Ancienne sous-directrice générale

Parcours

Ancienne sous-directrice générale de l’OMS, présidente du conseil d’administration du Medicines Patent Pool et de DNDi