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La collaboration entre les IFD européennes a continué de progresser durant la pandémie, permettant à ces institutions d’atteindre leurs objectifs d’investissement grâce à leur complémentarité d’expertise, de réseaux et de capacités. Cette approche constitue aussi un exemple essentiel de mobilisation du co-financement privé, qui sera crucial pour la réalisation des Objectifs de développement durable (ODD) et le respect des engagements de l’Accord de Paris sur le climat.

La pandémie de Covid-19 a, de façon générale, contribué à nous éloigner les uns des autres. Cela s’est appliqué aux familles, aux amis, aux collègues de travail. Nous avons tous dû apprendre le terme de « distanciation sociale », et le mettre en application bien plus souvent que nous ne l’aurions souhaité. Durant une bonne partie des deux dernières années, cet éloignement a marqué aussi la réalité des équipes, clients et partenaires des institutions de financement du développement (IFD) européennes. Mais la pandémie a aussi été l’occasion de s’unir, en particulier lorsqu’elle nous a présenté des défis insurmontables pour un individu seul ou une institution isolée. C’est l’expérience qu’ont vécue les IFD européennes, au sein desquelles, de Lisbonne à Helsinki, des collègues œuvrant depuis leur domicile ont trouvé fructueux – et rassurant – de travailler ensemble comme jamais auparavant. Cette collaboration s’est installée en réponse à des facteurs qui, dans bien des cas, préexistaient à la pandémie et resteront présents lorsqu’elle s’achèvera, même si les bouleversements qu’elle a entraînés ont apporté un élan supplémentaire aux nouvelles approches et à l’innovation. C’est ainsi que l’expérience des IFD européennes – une association collaborative qui aura 30 ans cette année et qui n’a cessé de grandir, à la fois en termes de membres et d’investissements annuels – aura été une expérience partagée par d’autres acteurs de la communauté visant le développement du secteur privé ou l’investissement à impact. À cet égard, l’exemple de ce qui a pu être accompli (et de ce qui reste à accomplir) peut se révéler instructif.

 

LA COLLABORATION AVANT ET PENDANT LA CRISE

Avant le déclenchement de la pandémie de Covid- 19, les IFD avaient déjà dû faire face à certaines remises en question de leurs modèles économiques ou modes de fonctionnement. L’environnement réglementaire dans lequel elles conduisent leurs activités est de plus en plus complexe, et fondé sur des règles qui ne prennent pas toujours en compte la position très particulière des IFD et de leurs clients du secteur privé dans les pays à revenu faible ou intermédiaire. Les ambitions européennes pour la finance durable (sustainable finance), et en particulier la taxonomie de l’UE pour les activités qui en relèvent, auront des conséquences sur le financement du développement, selon des modalités qui sont encore en cours de définition mais qui présentent déjà certains défis, dans la mesure où les investisseurs sont désormais soumis à des règles souvent écrites pour les économies développées. Dans les années qui viennent, les IFD devront s’attacher à surmonter ces obstacles à l’exercice de leur activité sur leurs marchés cibles. Dans le même temps, on attend des institutions de financement du développement qu’elles démontrent l’alignement de leurs pratiques sur les Objectifs de développement durable (ODD) et l’Accord de Paris, et qu’elles se montrent à la hauteur des attentes de l’opinion publique en jouant un rôle central dans la réponse au changement climatique et aux ambitions de la COP26, organisée à Glasgow en novembre 2021. Pour les IFD, ces défis sont simultanément stratégiques et opérationnels. Ils concernent à la fois leur façon d’exercer leurs activités et leur manière de conceptualiser leur mission en tant qu’investisseurs adossés à la puissance publique et axés sur l’impact. La pandémie en elle-même a également fait naître de nouveaux défis, en particulier la difficulté de voyager, qui a limité la capacité des IFD à former localement de nouvelles relations d’affaires ou à conduire des due diligences, mais aussi l’avènement du télétravail et la difficulté de suivre et concrétiser les objectifs d’impact en l’absence d’interaction de visu avec les bénéficiaires – sans parler des effets de la pandémie sur la rentabilité. Comme pour une majorité des acteurs, le principal défi a sans doute été, tant pour les IFD que pour leurs clients, le niveau élevé d’incertitude, qui a rendu plus compliqués les efforts de riposte.

 

LE CO-INVESTISSEMENT AU CŒUR DE LA STRATÉGIE DES EDFI

La collaboration était déjà un élément majeur du paysage des IFD avant la pandémie. Parmi les IFD européennes, le « co-investissement » (quand deux membres au moins de l’association financent un même client) représentait déjà environ 50 % des engagements d’investissement. Ce pourcentage n’a cessé de croître au vu des bénéfices que celui-ci apporte en matière d’efficacité, d’échelle, de partage d’expérience et de diversification. Le co-investissement a été plus marqué dans le financement des intermédiaires financiers (banques et fonds) et dans celui de projets d’infrastructures, mais il a aussi permis de démultiplier les capacités et d’augmenter par conséquent le financement d’autres secteurs. Dans la réponse qu’elles ont apportée aux défis évoqués précédemment, les IFD ont démontré la pertinence d’une poursuite de leur collaboration et ont renforcé leurs moyens de travailler ensemble, par exemple en créant un groupe de travail dédié réunissant les directeurs de l’investissement d’institutions partenaires au sein des réseaux d’EDFI et de l’Alliance des IFD, afin d’échanger sur l’impact de la crise sur leurs institutions – du point de vue des investissements, de leurs choix de soutien à leurs clients et collaborateurs, mais aussi des principes du travail en commun face à ces nouveaux défis. L’EDFI a aussi poursuivi son travail d’harmonisation, notamment en ce qui concerne les sujets climatiques, en développant une méthodologie partagée visant à aligner les projets d’investissement et les portefeuilles des IFD sur les objectifs de l’Accord de Paris1. De nouveaux partenariats ont également été lancés ou étendus avec des investisseurs institutionnels privés, au travers de la Climate Finance Leadership Initiative (CFLI)2 ou d’initiatives comme la Global Energy Alliance for People and Planet3. Dans chacun de ces cas de figure, plutôt que de se replier et de se concentrer avant tout sur leur propre institution en réponse aux défis externes, les IFD européennes ont reconnu la nécessité d’affronter collectivement les défis et de poser pour l’avenir les bases d’une collaboration renforcée. Ces efforts de coopération ont permis d’assurer un rétablissement vigoureux de l’activité d’investissement et de la performance des clients. Après un recul de 18 % en 2020 dû à la Covid-19, l’activité d’investissement des membres d’EDFI a retrouvé en 2021 ses niveaux d’avant la pandémie, avec des engagements record notamment en Afrique et sur des thèmes prioritaires d’impact comme le climat, l’investissement sensible au genre ou les PME (voir « Chiffres-clés », pp. 24-25). Ces résultats ont aussi été obtenus grâce au renforcement de l’accompagnement technique et de la collaboration avec les agences donatrices sur les solutions de financement mixte.

 

EXPLORER DE NOUVELLES FORMES DE COOPÉRATION

Dans une récente enquête (voir l’infographie ci-dessus), une majorité d’IFD européennes ont identifié le renforcement de la collaboration et du co-financement comme des sujets « plus importants » ou « beaucoup plus importants » depuis le déclenchement de la pandémie. L’un des aspects de la question, c’est de savoir comment les pressions et les nouvelles attentes évoquées ci-dessus influent sur l’évolution du rôle des IFD. Ces dernières s’attachent de plus en plus à compléter par de l’expertise et de l’accompagnement technique le soutien qu’elles apportent à leurs clients via l’investissement, mais aussi à « dé-risquer » l’investissement du secteur privé au moyen de financements concessionnels mixtes. En s’efforçant d’aborder au mieux ces diverses évolutions, les IFD européennes explorent de nouvelles formes de collaboration susceptibles de faciliter ce processus, avec notamment la mise en œuvre de standards exigeants qui instaureront une plus grande confiance entre institutions et permettront aux IFD comme à leurs clients d’éviter les doublons, et de proposer à ces clients différentes formes de soutien à valeur ajoutée. Parmi les priorités que l’on voit se dessiner pour la collaboration entre IFD, citons notamment :

  • L’approfondissement de l’harmonisation – Travailler ensemble à harmoniser les démarches de mesure d’impact et les requêtes d’information adressées aux clients directs et aux intermédiaires financiers, afin de réduire la charge administrative pesant sur les clients et d’augmenter l’efficacité. Agir également au niveau sectoriel pour favoriser la convergence en matière de mesure et de reporting d’impac
  • L’innovation de processus – Développer de nouvelles formes de coopération opérationnelle permettant de fluidifier les processus d’investissement et, ce faisant, de renforcer le co-investissement, pour les IFD comme pour leurs clients.
  • Les facilités conjointes – Continuer à promouvoir et à renforcer les facilités de financement conjointes, y compris la facilité de co-financement European Financing Partners (EFP) et les facilités de développement de marché et de garantie octroyées par l’entité EDFI Management Company dans le cadre d’un partenariat « Team Europe » avec les institutions de l’UE.
  • La promotion à tous les niveaux des efforts de collaboration – Continuer d’alimenter la coopération entre IFD en valorisant le partenariat et la culture du travail collectif au sein des équipes d’investissement et de l’ensemble des salariés, tout en obtenant l’adhésion des conseils d’administration et des actionnaires des institutions. Il est important de noter que cet effort ne se limitera pas aux institutions membres d’EDFI. Comme l’ont démontré des rapports de plus en plus étroits avec la DFC américaine, FinDev Canada et d’autres partenaires multilatéraux dans le cadre de la riposte pandémique, la collaboration peut être d’autant plus bénéfique qu’elle s’étend plus Cela vaut aussi pour les efforts d’harmonisation d’EDFI, qui doivent s’inscrire dans une convergence plus globale des modalités de mesure et de reporting d’impact, au niveau du secteur tout entier. La logique est la même que celle ayant conduit EDFI à participer au développement puis au lancement des Joint Impact Indicators4, à signer en 2021 un protocole d’accord5 avec la BERD ou encore à participer à la nouvelle Alliance pour l’entreprenariat en Afrique6.

Tout comme la pandémie nous a conduits à inaugurer de nouvelles formes de coopération dont les bénéfices se font déjà sentir, l’approfondissement des collaborations aidera aussi les IFD à répondre aux défis à long terme et à renforcer la résilience face aux futures crises. Dans le même temps, les IFD très axées sur la collaboration seront d’autant mieux positionnées pour mobiliser davantage de co-financements auprès des investisseurs privés. C’est une aventure dans laquelle l’ensemble du secteur s’est embarqué, et dont nous pouvons attendre qu’elle débouche sur davantage de soutien à nos clients, de nouvelles compétences et capacités, ainsi qu’une meilleure mise en œuvre de notre mission à long terme en faveur du développement.

 

1 https://www.edfi.eu/news/edfi-adopts-harmonised-paris-alignment-approach/
2 https://www.edfi.eu/news/climate-finance-leadership-initiative-details-approach-for-unlocking-climate-finance-in-emerging-markets/
3 https://www.edfi.eu/news/edfi-supports-launch-at-cop26-of-alliance-to-accelerate-renewable-energy-climate-solutions-and-jobs/
4 https://www.edfi.eu/news/leading-impact-investors-make-progresstoward-harmonised-impact-measurement-with-release-of-jointindicators/
5 https://www.edfi.eu/news/together-towards-more-impact/
6 https://www.edfi.eu/news/ifc-african-and-european-partners-launchalliance-to-support-private-sector-growth-in-africa/

Søren-Peter Andreasen

Directeur général
EDFI

Parcours

Avant de rejoindre EFDI en 2016, Søren Peter Andreasen a exercé pendant quinze ans dans le secteur du conseil, avec une spécialisation dans les domaines du développement, de la finance et de l’investissement sur les marchés émergents. Il est titulaire d’un master en politiques publiques de l’université d’Harvard. Il a débuté sa carrière professionnelle auprès du secrétariat général des Nations unies, à New York, avant de rejoindre McKinsey & Co. à Copenhague. Il a par la suite cofondé le cabinet de conseil Dalberg Global Development Advisors.

EDFI

EDFI – l’association des Institutions européennes de financement du développement – a été créée en 1992 pour soutenir et promouvoir l’action des institutions bilatérales de financement du développement (IFD). Avec un portefeuille cumulé de 44 milliards d’euros, dont plus de 10 milliards de financements climatiques, les quinze institutions membres d’EDFI partagent la vision d’un monde où le secteur privé peut offrir aux populations des pays à revenu faible ou intermédiaire des opportunités d’emploi décent et une amélioration de leurs conditions de vie, et où les flux de l’investissement privé s’alignent avec les Objectifs de développement durable (ODD) et l’Accord de Paris sur le climat. La mission d’EDFI est de promouvoir les intérêts communs de ses membres, d’impulser les politiques et de stimuler l’innovation au niveau des standards sectoriels.

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